Veliuttin Eddin Rifaat Pasha (‘Vely Pacha’) (1822-1891), ambassadeur ottoman
1re image: Soirée; 2e: Gravure après photo Desderi (1854); 3e: Photo par Desderi tirée du journal 'Le Musée Francais' (1862).
Vely Pacha était un invité prisé des vendredi-soirées de de Nieuwerkerke. Sa présence marquée dans Soirée au Louvre était sans doute liée à l’alliance franco-ottomane durant la guerre de Crimée (1853–1856) contre la Russie, ainsi qu’à sa grande popularité au sein de l’aristocratie parisienne. Il était une persona gratissima (la plus bienvenue) aux Tuileries (la Cour impériale). Viel-Castel signale sa présence le vendredi-soirée du 4 février 1854.
Né en Crète, fils aîné du grand vizir Mustapha Najili Pacha et d’une mère chrétienne, Vely Pacha mena une existence digne des contes des Mille et Une Nuits. À seulement trente ans, il fut nommé ambassadeur de l’Empire ottoman à Paris, poste qu’il occupa de novembre 1852 à février 1855. Ce mois-là, le peintre Gabriel Lefébure (1819-1874, peintre officiel de la cour de Napoléon III) réalisa un magnifique portrait de lui. On ne sait pas où il se trouve.
Diplomate séduisant et brillant orateur aux idées libérales, il s’imposa rapidement dans la capitale, fréquentant un grand nombre de soirées et de réceptions. Son charme et son indépendance, tant à Paris qu’à Londres, finirent par parvenir aux oreilles de son père, qui, choqué par ses frasques, le rappela en Crète.
Avant de transmettre ses fonctions diplomatiques à un membre d’une famille ottomane rivale, Vely Pacha organisa, le 10 février 1855, un somptueux bal à l’ambassade turque—un événement qui surpassa toutes les fêtes de l’hiver, réunissant l’ensemble de la haute société parisienne (y compris la princesse Mathilde) dans une atmosphère féerique. L'empereur lui envoya ce matin-là la Grand Croix de la Légion d'Honneur pour qu'il puisse la porter.
En tant que gouverneur de Crète, il se consola en recevant tous les journaux français et s'allia au représentant anglais, Henry Ongley, pour promulguer des réformes audacieuses, dont l'abolition de l'esclavage et l'interdiction de la peine capitale. Toutefois, ces mesures progressistes provoquèrent des tensions, suscitant l’opposition des nationalistes grecs et des fondamentalistes musulmans, tout en aggravant la rivalité entre les consuls anglais, autrichiens et français présents sur l’île. L’instabilité de cette province ottomane aboutit finalement à une révolte en 1858.
Contraint à l’exil à Thessalonique, Vely Pacha vécut ses dernières années dans la précarité, mourant ruiné et aveugle.
