Philippe-Francois Rousseau (1816 – 1887), peintre

1st image: Soirée; 2e: caricature par Giraud (c.1853); 3e: par Nadar (1865); 4th: par Nadar (1871).

Le Rat qui s'est Retiré du Monde (1852)

Philippe Francois Rousseau, peintre de natures mortes (du néerlandais stil leven : « vie silencieuse »), assista probablement à une vendredi-soirée de de Nieuwerkerke une seule fois, entre fin 1852 et le printemps 1854.
Il préférait une vie paisible à Acquigny, à l’ouest de Paris. Son invitation suivit le succès de Rat qui s'est Retiré du Monde, inspiré d’une fable de Jean de La Fontaine, présenté au Salon de 1852.

Ses œuvres, exposées dans des musées du monde entier (Met de New York, Cleveland Museum, Van Gogh Museum Amsterdam, Musée d’Orsay à Paris), ont longtemps été entourées de flou quant à ses origines. Il est souvent confondu comme le frère de Théodore Rousseau, fondateur de l’École de Barbizon.

La confusion s’intensifia lorsqu’ils furent tous deux proposés pour le titre de Chevalier de la Légion d'Honneur en 1852. Le ministre des Beaux-Arts hésita, déclarant :
"Quoi, deux Rousseau ? Je ne peux les décorer en même temps. Qui est l’aîné ? Le cadet attendra son tour." Le comte de Nieuwerkerke16 intervint rapidement pour clarifier qu’ils n’étaient pas apparentés, et ils reçurent tous deux l’honneur le 16 juillet 1852.

Mes recherches ont révélé que Rousseau est né dans l’ancien 3e arrondissement de Paris, avec comme second prénom François. Sa mère lui transmit son nom de famille après avoir été abandonnée par son père, le célèbre ténor Philippe Cauvy (1754–1820), à la suite d’une liaison. Cauvy brilla dans l’opéra Richard Cœur de Lion de Grétry (1783) avant de prendre sa retraite en 1805. Faute de présence paternelle, la naissance de Rousseau fut déclarée tardivement, le 23 février 1816, et il fut élevé par sa mère seule.
Plus tard, Philippe vécut également dans le 3e arrondissement, à Place Bréda (aujourd’hui Place Gustave Toudouze), quartier proche de Pigalle, connu pour ses artistes et ses résidentes aux professions dites « horizontales » (aussi appelées Bredas).

Rousseau creating a nature morte
(caricature by Giraud)

À 14 ans, Rousseau étudia sous l’égide du peintre Garneray, premier Peintre de Marine, qui lui faisait faire des courses. Dans Une Soirée au Louvre, il est représenté en discussion avec Morel-Fatio63, successeur de Garneray. Sa mère le confia ensuite au peintre paysagiste Victor Bertin qui ne lui enseigna que la technique. Il travailla plusieurs mois pour Léopold Leprince qui comprit le besoin de Philippe de gagner de l'argent et l'aida à augmenter sa vitesse.

Pour alléger le poids financier pesant sur sa mère, Philippe s’installa à Paris, gagnant sa vie en copiant des peintures du Louvre (Potter, Ruysdael) et en restaurant des portraits anciens. Lorsqu'un Anglais lui demanda une copie d'un tableau représentant un chien et des chiots, et qu'il fut très satisfait du résultat, Rousseau commença à réaliser davantage de peintures d'animaux et de paysages.
À sa grande satisfaction, son tableau d'un marais en Normandie (peint de mémoire) fut acceptée au Salon de 1834. Influencé par son vénéré peintre de natures mortes Chardin, le roi des réalistes, et conseillé par Isabey75, il s’orienta vers la peinture de natures mortes, ne réalisant des paysages que pour ses amis.

Lors de l'après-soirée de la salon de Nieuwerkerke au Louvre, Eugène Giraud11 caricaturait Rousseau, avec boutonnière de la Légion d'Honneur, le représentant de manière comique en train de créer une nature morte. Il attirait des poulets avec des graines de sa main gauche, tout en tenant un poulet nature morte sous son bras droit.

L’Exposition Universelle de 1855 consolida sa réputation lorsque le baron de Rothschild acquit deux natures mortes pour sa salle à manger. La princesse Mathilde et Alexandre Dumas figurèrent aussi parmi ses mécènes. Décrit comme « le génie de l’école française », Rousseau gagna en notoriété grâce aux gravures réalisées à partir de ses œuvres, qui permirent au grand public d’en profiter.
Le manufacturier Beauvais adapta ses créations pour tapisseries, fauteuils et rideaux.

Résidant à Place Bréda, mélomane Rousseau côtoyait ses amis de l’Opéra-Comique, où son père avait chanté, avec des peintres comme Isabey, Arago et Delacroix10, des musiciens comme Hermann-Léon et l’écrivain Émile Augier53. Augier et Arago faisaient partie du groupe d’amis présents à ses funérailles lorsqu’il mourut d’une hémorragie cérébrale en 1887. Sa collection de tableaux, comprenant également des œuvres de Chardin et d'Isabey, fut vendue aux enchères en 1889, pour une valeur de 32 000 francs (plus de 150 000 euros aujourd'hui).